Eymoutiers s’étale tout contre la Vienne, artère intimement liée à la cité pelaude.
Notre belle rivière a servi l’implantation du site urbain autour de la collégiale et dans les faubourgs. Elle a favorisé le développement des activités artisanales bien connues à Eymoutiers : les forges (quartier des « Farges »), les tanneries et la meunerie notamment.
Mais puisque rivière il y a et même si, dans les premiers temps, elle a plutôt constitué une défense naturelle, il a bien fallu la franchir. La construction de ponts s’est donc rapidement imposée.
Le plus ancien est celui de « Peyrat » que l’on appelle aujourd’hui pont des Tanneries. L’ancienne chapelle des Pénitents de la confrérie de Notre-Dame de Septembre ou du Pont, toute proche, lui a valu aussi l’appellation de « pont Notre-Dame ». Il permettait de quitter Eymoutiers vers le nord, vers Peyrat ou Bujaleuf. Il était à péage, comme il se doit, et celui-ci fut mis, en 1467 « sous la main du roi ». Lors de la désormais fameuse crue du 29 juin 1630, le vieux pont à avant-becs fut emporté ainsi que le moulin à écorce de Saint-Etienne. Un pont de pierre sera alors construit en remplacement. Un plan de 1879/1880, dressé par le conducteur principal Pallier, nous permet d’en garder un souvenir précis. Cet ouvrage de trois arches atteignait une longueur entre les culées de 33,70 m, avec une arche centrale de 9 m d’ouverture. Il possédait deux avant-becs triangulaires de 3,90 m de profondeur. Il n’avait pas de parapet mais des garde-fous en pierre de 0,65 m. En septembre 1880, était lancé la construction d’un nouveau pont à l’emplacement de l’ancien.
A l’est, dans la direction de Nedde et de Felletin, le franchissement de la rivière se fit d’abord à gué puis au moyen d’une barque qui, en langue limousine, se nommait « la nau ». Une vieille racine indo-européenne donnera des dérivés avec le sens de navire : la nef en vieux français, la nau en occitan. Il y a de fortes présomptions pour que se trouve là l’origine de l’appellation « pré Lanaud » = pré de la barque, moins poétique mais plus réaliste que l’interprétation renvoyant à l’anneau de l’évêque. Le pont de la Farge ou des Farges supplantera « la nau ». Il est mentionné en 1569 et 1644, mais il était en ruine en 1769. Il possédait trois arches. Deux, surbaissées, furent reconstruites en 1780 par le sieur Audouin, entrepreneur.
Ce pont avait lui aussi ses deux avant-becs profonds de 3,90 m. Il était en pierres de taille et en moellons ainsi que les avant-becs. Les garde-fous étaient en bois et, paraît-il, en très mauvais état. Fondé sur rocher, il atteignait une longueur entre les culées de 29 m 40. Il fut démoli en 1875 et reconstruit immédiatement, tel qu’on le connaît maintenant. Il fut cependant élargi, fin 1988, début 1989 et doté d’une rambarde métallique ajourée dégageant une vue intéressante sur la rivière.
Ces ponts, plus larges et plus résistants sont certes mieux adaptés au trafic mais nous font regretter que l’on n’ait pas conservé les vieux ouvrages médiévaux à avant-becs. Imaginons Eymoutiers avec ceux-ci, au pied des tours et des remparts sauvegardés … quel bel atout architectural et touristique a ainsi disparu !
Les grands chantiers pelauds du milieu du XIXème siècle ont modifié les voies de pénétration et de traversée d’Eymoutiers. En 1838 une nouvelle artère fut ouverte en direction de Peyrat et la première pierre du pont de Toulondit ou Pont-Neuf sera posée. Les autorités y scelleront une boîte contenant un exemplaire de chacune des pièces de 5 F, 2 F, 1 F, 50 c, 25 c, frappées la même année à l’effigie de Louis-Philippe. Il n’était dorénavant plus nécessaire de passer par les Tanneries et Macaud pour se rendre à Peyrat ou à Bujaleuf.
Dans les années 1850, fut percée la grande avenue à partir de la place Notre-Dame, en direction du sud et de la Corrèze. Pour cela il a fallu édifier le grand pont du Pré-Thibaut, sur le ruisseau de la Planchette.
L’arrivée du chemin de fer a jalonné la traversée de la commune d’un grand nombre d’ouvrages d’art depuis le viaduc de la Pénelle, en passant par celui de la Varache, celui des 24 piles, le pont de Mingonnat, celui de la Font Macaire jusqu’au pont Vignane … mais le monument le plus marquant de cette épopée ferroviaire reste le pont de Fer ou Métallique qui fait partie intégrante du paysage pelaud. Mis en service en 1883, sur la ligne d’Ussel, le train le franchit peu après la gare. Long de 120 m et haut de 7,60 m, il enjambe la route puis la Vienne. Dynamité par la Résistance, il en verra, par la suite, de toutes les couleurs, virant coquettement d’un gris bien triste à un vert et un marron plus pimpants !
Enfin, l’année 1994 a connu l’arrivée du petit dernier des ponts de notre cité. La passerelle en bois a été posée au mois d’août et, réservée aux piétons, elle leur permet d’accéder, depuis les Porots, au parc du Pré Lanaud. Parfaitement insérée dans le site, elle a vite été adoptée par les Pelauds.
Ville de relief, Eymoutiers intègre la rivière et ses ponts dans son paysage et son histoire ; pour s’en convaincre, … il suffit de passer le pont.